Capucine 5
Capucine se rend à l'anniversaire de Maxime en cachette pour voir ce qu'il s'y passe.


L'après-midi du jour de la fête d'anniversaire de son voisin arrive. Lana est invitée chez elle pour essayer le nouveau jeu de chants et de danses "La Star, c'est toi !" que sa tante lui a offert lors de sa dernière visite - jeu offert, en sus, avec un lot de superbes robes de bal pour poupées Barbie. Son amie n'arrive qu'aux alentours de 16h00. Il n'est que 14h00 et Capucine entend déjà les cris de salutations excitées et des éclats de rires qui émanent du bout de la rue. Elle ouvre sa fenêtre, se penche un peu, pouvant ainsi apercevoir les voitures des parents se garer le long des trottoirs desquelles sortent les enfants avec enthousiasme pour se précipiter vers la porte de la maison de Maxime. Elle reconnaît Louane et sa maman. La petite fille s'est montrée gentille sans discontinuer malgré les refus de Capucine de se joindre à ses jeux. Elle a vraiment un bon fond et se montre bienveillance avec tout le monde, même avec les exclus ou les vilains - ou trop coquets - petits canards de l'école. Capucine regrette vraiment de ne pas avoir tenu tête à Lana et ne pas aller à cette fête. Cela étant, elle a encore deux heures avant l'arrivée de son amie. Une folle envie d'aller espionner son voisin et ses amis germe dans l'esprit de la petite fille sage. Ainsi, elle pourrait raconter à Lana ce qui se déroule chez leur camarade et, au pire, elles pourront jaser à qui mieux mieux sur le groupe d'enfants, au mieux, aller jouer avec eux !
Elle demande la permission à sa maman de sortir pour aller saluer Maxime et lui souhaiter une belle fête d'anniversaire. Louise, depuis son bureau, lui dit qu'elle est d'accord mais qu'elle fasse attention à l'heure de l'arrivée de Lana au cas où elle déciderait de rester un peu avec ses camarades. Capucine pense qu'il n'y a vraiment aucune chance pour que cela arrive et sort le plus furtivement possible de sa résidence. A mesure qu'elle s'approche en rasant les murs - mais pas trop pour ne pas abîmer sa nouvelle robe -, elle entend des bribes de conversations, des rires, des cris de joie. Elle se sent attirée de manière incoercible vers la maison de Maxime. Malheureusement des haies de tuyas très hautes enserrent le jardin de la maison de la famille de Maxime : Capucine entend les exclamations de gaieté, entend des conversations à propos de l'école puis au sujet d'une camarade qui n'a pas pu venir parce qu'elle devait passer la journée avec quelqu'un d'autre - elle reconnaît la voix de Louane... Or, en entendant la réponse de l'interlocutrice indéterminée ("Ah ! Le duo des princesses !"), la fillette comprend que les petites filles parlent d'elle et de Lana. Elle se sent un peu vexée tout en étant flattée que l'on prenne de ses nouvelles malgré sa mise à l'écart volontaire depuis son arrivée datant de trois mois à présent.
Elle aimerait tout de même vraiment parvenir à voir ce qu'il se passe dans le jardin car elle entend des choses contradictoires : des rebonds de ballon - facile à reconnaître et évidents dans le jardin d'un garçon - et ce qu'elle identifie comme des bruits de grelots ou perles métalliques... Que se passe-t-il donc chez Maxime ? La curiosité la rend téméraire : si elle grimpe sur le muret - pas très haut - qui borde la maison voisine, puis sur le conteneur de poubelles de recyclage qui se trouve à proximité, et, enfin, qu'elle s'appuie sur les tuyas taillés de manière impeccable, presque aussi plats qu'une table ou un bureau, elle devrait pouvoir espionner tout en restant inaperçue.
Mettant son plan à exécution en faisant bien attention de ne pas abîmer ou froisser sa jolie robe, elle escalade les différents éléments qui vont lui permettre de regarder dans le jardin. Avec prudence, pour ne pas toucher une araignée - il y en a partout de ces horribles créatures munies de trop de pattes ! - ni faire un trou dans sa robe, elle appuie ses avant-bras sur le haut des haies de tuyas. Elle est malgré tout sur la pointe des pieds et la posture n'est pas très stable (d'autant plus qu'elle a l'impression de sentir des bestioles avec plein de pattes grimper sur ses bras). Le jardin est charmant, parsemé de parterres de fleurs multicolores et peuplé par un groupe d'enfants joueurs et un énorme lapin-bélier qui se dore au soleil tout en acceptant sans bouger la moindre moustache les caresses des enfants qui l'entourent. Comme Capucine aimerait pouvoir le voir et caresser ses longues oreilles ! Il semble si gentil ! Plus loin, elle aperçoit Louane qui a rejoint un petit groupe de garçons de la classe pour faire une partie de mi-foot mi-basket. La petite fille, dans une posture de plus en plus instable, se dit que sa camarade est un véritable garçon manqué et qu'elle ne peut décemment pas devenir vraiment amie avec une enfant comme elle. Cela étant, son regard est attiré par le lapin qui se lève en s'étirant avec tranquillité, éveillant des éclats de rire parmi ses admirateurs. C'est alors que l'impensable se produit !
Capucine sent les branchages de la haie de tuya sur laquelle elle s'appuie de plus en plus pesamment céder sous son poids alors que l'un de ses pieds glisse sur le couvercle du conteneur. Elle finit à moitié la tête et le buste au milieu du pauvre tuya écrasé et les jambes dans l'herbe du jardin de Maxime. Ayant fait plusieurs années de GRS, elle a rétabli autant que possible la situation en faisant une sorte de roulade écrasée. Elle est un peu sonnée et ne réalise pas tout de suite la situation. Mais progressivement, et surtout en voyant un groupe d'enfants, essentiellement de garçons, courir vers elle, elle réalise qu'elle vient de tomber dans le jardin de son voisin chez qui elle était conviée et dont elle a refusé l'invitation. Tout à la fois, elle ressent de la honte et de la peur : elle vient d'entrer par effraction depuis le haut d'un tuya chez son camarade de classe et des garçons courent vers elle en criant. Elle protège son visage avec ses bras et pousse un petit cri strident car la première chose à laquelle elle pense est qu'elle est prise pour une intruse, à juste titre, et qu'elle va payer cher le prix de son espionnage et de son entrée fracassante.
Très étonnée, elle sent une main passer contre son dos meurtri par les petites branches de la haie afin de l'aider à se redresser. Elle entend plusieurs voix inquiètes lui demander si elle a mal quelque part. Osant ouvrir les yeux, elle constate que la plupart des enfants présents chez Maxime l'entourent et que sa maman sort par la porte-fenêtre avec une trousse à pharmacie. Elle parvient à répondre, très gênée, que tout va bien malgré quelques égratignures. Marie, la maman de Maxime, s'agenouille près d'elle, lui demande si elle peut marcher, si elle a mal quelque part, si elle voit trouble, si elle a envie de vomir et finit par lui demander comment elle s'est retrouvée quasiment incrustée dans une de ses haies !? Capucine balbutie des explications chaotiques tandis que Marie tamponne un coton imbibé de désinfectant sur ses égratignures. Maxime vient à son aide en répondant qu'elle souhaitait lui faire une farce en le surprenant depuis le haut de la haie et qu'elle était malheureusement tombée. Toutes ses petites blessures soignées, elle est invitée à rejoindre le groupe d'enfants qui s'est égaillé en attendant le départ de la mère de famille. Capucine ne peut s'empêcher de balayer l'herbe du regard dans l'espoir d'apercevoir le gros lapin entrevu avant sa chute spectaculaire. Maxime s'en aperçoit et propose à sa voisine d'aller saluer Caramel, le lapin-bélier de 6 kg de sa sœur Coraline : pendant qu'elle fait connaissance avec lui, le petit garçon lui demande de lui raconter le comment et le pourquoi d'une telle entrée en scène. Tous les enfants les ont rejoints autour de Caramel qui ne s'en formalise aucunement, curieux d'apprendre également comment une petite fille aussi discrète et sage peut atterrir ainsi dans le jardin de son voisin.
Capucine, honteuse, avoue sa curiosité, son plan pour espionner juste une minute, et sa chute désastreuse. La présence douce et calme de l'énorme lapin d'une placidité à toute épreuve la réconforte. Alors qu'elle raconte les différentes étapes de son plan en caressant les longues oreilles du lagomorphe, qui se met à mâchouiller des brins d'herbe avec application, ses camarades rient de bon cœur et lui demandent encore si elle n'est pas blessée. Capucine est étonnée de constater tant de bienveillance chez les garçons du groupe d'amis. Par ailleurs, elle compte presque autant de filles que de garçons parmi les invités. Maxime lui dit qu'elle peut rester avec Caramel autant qu'elle veut car il adore être au centre de l'attention mais qu'elle peut aussi rejoindre la table des créatrices et créateurs de médailles destinées à récompenser les trois gagnants d'une course d'agility : le parcours et les obstacles sont normalement destinés à Caramel, mais, vu sa taille, il semble qu'un enfant de 8 ou 9 ans normalement constitué peut passer en-dessous ou par-dessus les différents éléments. Coraline ayant son accord, certains doivent s'occuper du tracé du parcours et des règles, tandis que d'autres confectionnent les colliers-médailles. C'est avec un plaisir non dissimulé qu'elle rejoint le groupe dévolu à la création des bijoux de victoire. Elle se retrouve rapidement enseignante ès tressage de perles parmi les enfants - filles et garçons - extrêmement attentifs à ses explications et les mettant en pratique avec un succès parfois limité.
L'heure tourne sans qu'elle s'en soucie, oubliant que Lana doit arriver chez elle à 16h00. Soudain, alors que la petite troupe enjouée sort pour mettre en place les obstacles du parcours imaginé par Maxime, Romain et Adrien - sous le regard attentif de Caramel habitué à obtenir des friandises lorsqu'il aperçoit les ponts et plots en bois -, Capucine se préoccupe de l'heure. Elle s'écrie qu'il faut impérativement qu'elle rentre chez elle car Lana va arriver d'une minute à l'autre. Elle adorerait rester mais ne peut pas abandonner son amie alors qu'elle l'a invitée à passer une partie de l'après-midi et la nuit chez elle. Elle pense en son for intérieur que si Lana pouvait être invitée aussi, ce serait parfait ! Elle pourrait profiter de la présence de ses nouveaux amis et de celle de sa meilleure copine à la fois. Cependant le problème est double : d'une part, il ne serait pas poli d'imposer Lana chez Maxime alors qu'elle n'a pas été invitée initialement ; d'autre part, même si Maxime proposait à Capucine de revenir accompagnée de Lana, la fillette risquerait d'opposer un refus farouche à une invitation chez un garçon qui, en outre, l'avait dédaignée dans un premier temps ! Louane, toujours serviable et percevant les regrets et les obligations entremêlés dans les aurevoirs de Capucine, propose d'inviter Lana à la fête de Maxime.
Une vague de protestations s'élève à la seule évocation de l'amie de Capucine. Les enfants qu'ils soient filles ou garçons se montrent agacés par le rejet dont elles ou ils font l'objet à partir du moment où la petite fille les étiquète dans la mauvaise catégorie : "garçons = beurk !" ou "pas assez princessanh" ! Les imitations de "Princesse Lalalère" se succèdent. Devant le regard navré de Capucine, Maxime lui explique que Lana se montre depuis toujours très intransigeante envers les enfants qu'elle juge dignes d'être ses amis et les autres. Aussi seules les filles ultra féminines comme Capucine ont-elles grâce à ses yeux. Par ailleurs, les critiques souvent piquantes et inépuisables de son répertoire, à propos de tous les enfants de sa connaissance - et de leurs parents -, ont blessé profondément plus d'un.e de ses caramades. Par égard pour ses amis, le petit garçon ne souhaite pas gâcher sa fête avec la présence de Lana : il est certain qu'elle n'aura pas l'ouverture d'esprit de "sa petite espionne acrobate de voisine" ajoute-t-il avec un clin d'œil ! Capucine regagne alors sa maison avec quelques regrets, mais ravie d'avoir eu la chance de se faire plusieurs connaissances très sympathiques. De plus, elle a vécu une petite aventure qui restera dans les mémoires et elle se sent particulièrement vivante et pleine d'allant !